dimanche 18 octobre 2009

LE TERROIR ENTRE LES MAINS DE L'HOMME

Dernièrement, au fil de mes nombreuses lectures sur le monde du vin, je suis tombé sur une nouvelle annonçant l’embauche comme consultant, par le producteur chilien Santa Rita, de Brian Croser. M. Croser est le fondateur de la réputée maison australienne Petaluma, et il a aussi été un professeur d’oenologie. Il est considéré comme une figure très influente dans l’évolution vinicole de l’Australie au cours des 35 dernières années. Il a été nommé homme de l’année dans le monde du vin en 2004 par la revue britannique Decanter. J’ai lu une entrevue qu’il avait donné pour l’occasion, entrevue au cours de laquelle on l’interrogeait sur son parcours et sur sa vision du vin. Dans cette entrevue, on mentionne que M. Croser n’a pas eu que des admirateurs et qu’il a été fortement critiqué pour son obsession à préserver les saveurs fruitées dans le vin en misant sur une hygiène stricte et sur des techniques anaérobiques pour préserver le vin de l’oxydation. On dit dans l’article de Decanter que plusieurs ont blâmé cette philosophie, dont Croser fut l’ardent promoteur, pour le stéréotype voulant que les vins australiens ne soient rien d’autre que des vins simples et très fruités.

Quand j’ai lu cela, j’ai été interloqué, mais en même temps, pas vraiment surpris. Il existe un courant de pensée dans le monde du vin, c’est un courant diffus et plutôt souterrain, pour qui le vin intéressant origine d’autre chose que du fruit lui-même et du lieu où il a été produit, même si plusieurs intervenants de cette mouvance aiment parler de terroir. J’ai de la difficulté à comprendre en quoi l’hygiène stricte et des techniques de limitation de l’oxydation peuvent être des ennemis du bon vin et de son identité réelle. Ce que l’accusation mentionnée ci-haut envers la vision de Croser sous-entend, c’est que les vrais bons vins complexes ne proviennent pas essentiellement des qualités du fruit et de la fermentation et de l’élevage du vin en conditions hygiéniques. Qu'il doit y avoir autres chose.

Ce qui est paradoxal dans tout ça, c’est que ce même Croser est un des pionniers de la notion de terroir en Australie. Il est un des premiers à avoir prôné la plantation des différents cépages en des lieux leurs étant adaptés, chose qu’il a appliquée dès les années 70 avec son projet Petaluma. D’ailleurs, Croser, malgré les critiques et les années, n’a pas changé d’idée et persiste avec sa vision des choses. Pour lui la maîtrise des conditions de vinification est la base essentielle à l’élaboration d’un bon vin. Selon lui, quand toutes les bonnes pratiques sont en place, c’est là que le “winemaker” peut s’aventurer à des choses plus risquées, comme l’utilisation de levures indigènes, la non filtration, et même, à la limite, au non usage de sulfites

Une chose est sûre pour moi, le bon vin, son caractère et sa complexité se font d’abord au vignoble, en plantant le bon cépage au bon endroit, et en menant la vigne de la meilleure façon possible par rapport aux conditions. Le processus de vinification de base ne devrait être qu’un transducteur de ce qui a été obtenu au vignoble. La qualité du vin ne vient pas d’activités microbiologiques secondaires, ou bien d’un processus oxydant prématuré. Bien sûr le “winemaker” a de nombreux choix à faire en cours d’élaboration qui peuvent influencer le style du vin qui sera obtenu, mais ces choix n’ont rien à voir avec un manque d’hygiène ou un laisser-aller oxydant. Pour faire le lien avec le message précédant où je disais que le vin n’est pas un produit naturel, et bien le contrôle et la maîtrise de ce qui se passe au chai de vinification va directement dans ce sens, et ça va aussi dans le sens de ce que devrait être un vrai vin de terroir. Quand un vigneron a produit un vin en contrôlant les choses du vignoble au chai, il peut dire en toute honnêteté que pour lui ce vin est le reflet de son terroir, car il en a une idée claire et il a pu la concrétiser. Alors que le laisser-aller peut mener à n’importe quoi. Je suppose que c’est ça qu’on appelle le vin naturel...





http://www.decanter.com/specials/48127.html

http://www.decanter.com/news/news.php?id=290423

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