C'était le titre d'un fil de discussion que j'avais initié sur FDV en juin 2008, un peu l'ancêtre
de ce blogue. Le temps passe... Je ne sais pas si j'étais
prophétique, mais six ans plus tard, "The new Chile"
est le titre de l'édition de mai, actuellement en kiosque, du
magazine américain Wine Spectator. Il y a longtemps que j'avais
acheté ce magazine, mais avec le thème, et avec le texte que je
venais d'écrire sur la quête de reconnaissance du Chili, je n'ai pu
résister à aller voir ce qu'on disait de mon pays vinicole de
prédilection, surtout avec un titre semblable. Résultat? Sans
réelle surprise, le contenu est plutôt décevant pour moi qui
connaît très bien ce pays et qui en ai une haute opinion. Bien sûr,
on reconnaît les changements qui ont cours depuis plusieurs années
au Chili. On reconnaît les efforts pour devenir un pays vinicole
complet, mais le ton demeure paternaliste, et en ce sens, le pays est
traité en adolescent et non pas comme le jeune adulte talentueux et
versatile qu'il est en réalité. Ceci dit, on aborde la quête de
reconnaissance du pays que j'évoquais dans mon article précédant,
et ce par la voix d'Aurelio Montes qui déclare : "Nous
avons besoin d'être reconnus et respectés . Le Chili n'a pas
d'image, sinon celle d'être un pays ennuyant". En gros, le propos
de Montes est que le pays n'est pas excitant. Ça rejoint mon constat. Ce problème reste
entier, même si le sous-titre du Wine Spectator parle de vins
excitants. Les vins le sont peut-être, mais pas le pays.
Au-delà de ces considérations, le
contenu de cette édition du Wine Spectator est quand même
informatif, même si personnellement je n'y ai rien appris. On trace
les grandes lignes du paysage vinicole chilien, on interroge
brièvement quelques producteurs, et on a droit à un autre article
sur le Carmenère. Ça demeure dans les généralités. Kim Marcus,
est le nouveau journaliste-dégustateur en charge de couvrir le pays,
et on sent que sa connaissance des vins chiliens est limitée, en ce
sens qu'elle manque de perspective. L'excellent potentiel de garde
des rouges du pays n'est pas évoqué, et l'évaluation qualitative
des vins laisse songeur. Bien sûr, avec Wine Spectator on se butte
immanquablement aux faiblesses du fameux système de notation sur 100
points. Disons que le ton de l'appréciation est donné avec un
tableau où on note les millésimes chiliens depuis 2005. De manière
inexplicable, le meilleur millésime, 2007, obtient une note de 93.
On parle ici de conditions météorologiques, pas de la qualité d'un
vin donné. Il semble impossible d'avoir un millésime qui se
rapprocherait de la perfection dans un pays qu'on décrit pourtant
comme un paradis de la viticulture. Je pense que ce fait est
symptomatique et que ça reflète un état d'esprit face à ce pays.
Il y a un plafond qualitatif pré-établi, hors de toute raison. Si
les millésimes d'un pays aux conditions climatiques reconnues comme
généralement très favorables ne peuvent être notés plus haut que
93, imaginez ce qui en est pour les vins. Le vin le mieux noté est
le Don Melchor, 2010, avec 95 points, puis suivent les noms
habituels, Almaviva, Clos Apalta et Montes Folly à 94. Le blanc avec
la plus haute note est un Chardonnay de Kingston Family avec un 91.
Vous allez me dire que je ne devrais
pas m'en faire avec ces notes, vu que je ne crois pas en la validité
de ce système. Ce n'est pas vraiment le cas, car si je ne crois pas
à la précision des notes sur 100 pour évaluer un vin donné, un
ensemble de notes pour de très nombreux vins est plus significatif.
Le plafonnement à 95 pour les rouges et 91 pour les blancs est très
significatif à mes yeux. C'est comme lire un compte-rendu de
dégustation très élogieux sur un vin, puis de voir une note
numérique à la fin qui semble contredire les mots qui le décrivait.
C'est le chiffre qui l'emportera au final dans l'esprit du lecteur.
Donc, avec ce spécial Chili du Wine Spectator, ce sont les chiffres
de la fin qui font foi de tout. Au-delà des bons mots, de
l'évocation de nouveaux terroirs, de vins excitants, le Chili
demeure catégorisé comme un pays de seconde classe qui travaille
fort pour sortir de sa condition. Un pays qui frise la grandeur, mais
qui pour une raison inexplicable n'y accède pas.
Salut Claude,
RépondreSupprimerJe n'ai pas lu l'article en question, mais ne suis nullement étonné du ton donné par WS. Ils ont toujours eu un regard presque méprisant pour les régions vinicoles du nouveau monde; et même de certain pays d'Europe.
J'avais d'ailleurs arrêté de le lire pour ça. Trop américanophile à mon goût (naïveté quand tu nous tiens). J'ose espérer que pour un amateur qui connait mal le Chili ou qui entretient encore des perceptions de vins d'entrée de gamme, cette article les aidera à revenir et tester leur produits; plutôt que de nuire
Pour ma part, je continue mon exploration à l'aide de ton expertise et conseils sur ce blogue, et j'en suis bien heureux.
Salut Thomas,
RépondreSupprimerCe genre d'article contribue à garder le Chili, par défaut, comme leader du rapport qualité/prix. C'est bien pour le consommateur avisé, mais d'un autre côté, je ne peux m'empêcher de partager la frustration des producteurs chiliens.
Claude
Voici un lien vers un autre article intitulé "The new Chile". L'auteur est Patricio Tapia du guide chilien Descorchados. C'est l'expert de la scène vinicole chilienne, et son article met le focus sur de petits producteurs et des expérimentations à petite échelle chez de plus gros producteurs.
RépondreSupprimerClaude
http://wineandspiritsmagazine.com/pages/2014/0314/0314_chile.html
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