Neil Martin à l'oeuvre lors d'une dégustation qu'on pourrait qualifier d'industrielle. Noter des vins sur 100 est déjà farfelu, mais le faire de façon aussi intensive, à étiquette découverte, avec les vins d'un pays qu'on connaît mal, est carrément ridicule.
L'autre élément qui semble avoir
heurté les chiliens avec ce rapport, c'est que le même Neil Martin
a été plutôt élogieux dans ses rapports récents sur l'Argentine
et l'Afrique du Sud. Deux pays qui sont des concurrents directs du
Chili et qui ont une structure de production similaire, même si ces
pays ne possèdent pas une locomotive de la qualité de Concha y
Toro, une compagnie reconnue par plusieurs pour être la meilleure compagnie vinicole au monde. Une compagnie qui
sait allier volume, qualité et diversité. Bien sûr c'est une
compagnie énorme, surtout si on ajoute toutes ses filiales, mais en
même temps c'est une compagnie qui réussit un tour de force
incomparable dans le monde du vin. Pour un pays totalement axé sur
l'exportation c'est un atout incroyable. Ceci dit, ce qui est encore
plus incroyable, c'est que l'existence d'une telle compagnie soit mis
au passif d'un pays lorsque vient le temps de rendre compte de sa
réalité. Il n'y a que des préjugés idéologiques qui peuvent
guider un tel jugement et c'est d'autant plus surprenant de la part
d'un critique dont l'intérêt principal a toujours été les vins de
Bordeaux. C'est donc bizarre de le voir débarquer au Chili en
prônant que "small is beautiful", en vantant
l'approche naturelle dans l'élaboration du vin, tout en disant que
le Chili devrait se concentrer sur un cépage comme le Carignan,
plutôt que sur le Cabernet Sauvignon.
Il doit être très difficile pour les
producteurs chiliens de voir quelqu'un comme Neil Martin débarquer
pour la première fois dans leur pays, sans connaissance approfondie
des vins qui y sont produits, pétri de préjugés, pour finalement
leur donner une leçon de morale idéologique. En même temps, je
pense que l'influence de Neil Martin est très limitée car de toute façon les abonnés du Wine Advocate ont très peu d'intérêt
pour les vins sans prestige du Chili. N'empêche que les producteurs
chiliens sont très sensibles aux notes et aux médailles, et
j'espère que le rapport de Neil Martin les incitera à y porter moins attention et à faire les
vins qu'ils veulent vraiment. J'espère
qu'ils prendront conscience que le système de notation sur 100 est
un leurre, et qu'ils s'émanciperont du syndrome du colonisé où un
critique étranger peut venir leur dire avec condescendance ce qui devrait être le mieux
pour eux. N'empêche que le Chili, malgré les grandes avancés des quinze dernières années, ne l'a jamais facile et semble
prisonnier de son problème d'image.
Finalement le règne de Neil Martin comme critique des vins du Chili pour le Wine Advocate aura été de courte durée. Le magazine a annoncé que quelqu'un d'autre serait nommé pour couvrir les vins de ce pays. Le ridicule système de notation sur 100 va demeurer, mais espérons que la nouvelle personne aura plus de jugement que M. Martin.
RépondreSupprimerClaude