La cuvée Ciprese Vineyard, 2005, fut
un de mes premiers contacts avec ce que j'appelle le nouveau Chili.
Ce vin avait été une révélation pour moi et j'en avais acheté
pas moins de 18 bouteilles, dont une douzaine pour en suivre l'évolution et le potentiel de garde. Il m'en reste aujourd'hui huit. C'est
donc un vin dont j'ai suivi l'évolution de près. Il tient encore
très bien la route et a évolué de belle façon tout en conservant
avec l'âge son caractère baroque. Je n'aurai pas la chance de faire
de même avec ce 2007, car je n'avais pu mettre la main que sur deux
bouteilles. Celle-ci est la première que j'ouvre. J'ai bien hâte de
voir ce que ça donne.
La robe est encore de teinte vert pâle,
sans signe apparent d'évolution. Le nez est modéré et étonnant
dans son expression. À l'aveugle j'aurais probablement misé sur un
vin de Riesling plus que sur un Sauvignon Blanc. On y retrouve des
notes légèrement citronnées et miellées, ainsi qu'un très bel
aspect floral. Le point le plus surprenant est l'absence de notes
végétales vertes typiques de ce cépage et surtout de cette cuvée.
Beau nez agréable, mais quand même déroutant pour quelqu'un qui
connaît très bien le millésime 2005 et qui s'attendait à
retrouver un lien de parenté dans ce 2007. En bouche le vin montre
un bel équilibre qui s'appuie sur un aspect citronné plus marqué
qu'au niveau olfactif. L'acidité est bien présente, mais le temps
semble en avoir un peu émoussé le tranchant, ce qui donne un vin
plus facile à boire par lui-même. En milieu de bouche le vin est
intense et bien concentré. Il affirme bien sa présence et l'aspect
floral se marie bien au fruit pour donner une agréable sensation
gustative. La finale montre un beau mariage des saveurs, avec une
certaine rondeur et une allonge de haut calibre.
Pour parler un langage de chimiste, je
dirais que cette cuvée est passée du mode pyrazinique en 2005 au
mode terpénique en 2007. J'ai dégusté ce vin en relative jeunesse
lors d'une dégustation thématique sur le Chili il y a deux ans et
il m'avait alors semblé plus près du profil standard pour un
Sauvignon Blanc de climat frais. Deux jours après la dégustation du
2007 j'ai ouvert une bouteille de 2005 pour comparer. Le contraste
était frappant. Je sais qu'il y a deux ans de différence entre les
deux vins, mais la robe du 2005 était beaucoup plus foncée. Il faut
dire que le 2005 est embouteillé sous liège, alors que le 2007 est
sous capsule à vis. Je ne sais pas si cette différence explique en
partie le profil atypique du 2007. Je complète la rédaction de ce
texte en terminant la bouteille de 2005, et je dois avouer que je
suis un peu triste. Ce n'est pas que je préfère le 2005 au 2007 en
terme de qualité, à ce niveau ils sont comparables, mais le 2005
est un vin tellement original que ça m'attriste de penser que ce
style a été abandonné. C'est comme boire une espèce en voie de
disparition. Bien sûr, on pourrait penser que cette différence
n'est due qu'à une question de millésime, mais selon ce récent texte de Petrer Richards à propos de Casa Marin, un changement
stylistique a été opéré à partir de 2007. Maria Luz Marin attribue ce changement à l'âge des vignes, mais je ne suis pas totalement convaincu par cette explication. Le changement est trop marqué pour s'expliquer par cet unique facteur. Je pense qu'il s'agit surtout d'une décision commerciale. En un sens cette
décision de changer le style de ce vin est un peu compréhensible
car le style sauvage du 2005 était loin de faire l'unanimité. On se
souvient que la SAQ avait retiré ce vin de la vente, alléguant que
celui-ci était défectueux, avant de changer d'idée plus tard, non
sans avoir créer un froid durable avec le producteur. Ce fut
d'ailleurs la première et dernière apparition des vins de Casa
Marin sur les tablettes de la SAQ. C'est bien dommage. Malgré cela,
j'avais réussi à me procurer deux bouteilles de ce 2007 et il est
clair que si la qualité est toujours au rendez-vous, le style est
plus rassembleur, même si moins original. Casa Marin est un
producteur qui continue de m' intéresser et dont je vais continuer
de rechercher les vins, en espérant les revoir un jour à la SAQ. La
SAQ offre de plus en plus de vins chiliens intéressants, des vins
venant de certains des meilleurs producteurs du pays. Ceci dit, il y
encore bien des absences regrettables et Casa Marin est assurément
une de celles-ci.
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