vendredi 25 février 2011

PINOT NOIR, TOBIANO, 2008, CASABLANCA, KINGSTON FAMILY VINEYARD



L’offre de bons vins chiliens, lentement mais sûrement, va en s’améliorant à la SAQ et en importation privée. Des vins de nouvelles régions et de cépages différents sont maintenant disponibles. Le Chili ne se résume plus aux vins de cépages bordelais issus de la vallée centrale. Ainsi donc, j’entame avec ce Tobiano de Kingnston Family un petit spécial sur le Pinot Noir chilien. Un cépage particulier, difficile à maîtriser, qu’un nombre croissant de producteurs chiliens installés sur des terroirs frais tentent d’apprivoiser. Pour ce faire on engage parfois des consultants étrangers, comme le californien Byron Kosuge dans le cas de Kingston, ou bien des bourguignons comme Pascal Marchand chez Veranda, ou bien Martin Prieur chez Cono Sur. Ceci sans compter les spécialistes étrangers du Pinot qui se lancent directement, comme Nicolas Potel, ou bien Kevin Harvey de Rhys Vineyards, ou encore Louis-Michel Ligier Belair qui tous développent actuellement de nouveaux projet dans la fraîche vallée de Bio Bio. Bien sûr, le Pinot Noir est un cépage qui est encore très loin d’avoir atteint son plein potentiel au Chili, mais de plus en plus de vins intéressants, souvent issus de très jeunes vignes, font leur apparition à chaque année sur le marché. Selon ce que j’ai pu goûté jusqu’à maintenant, j’ai confiance que le Pinot Noir pourra suivre les traces déjà remarquables de la Syrah au Chili. Toutefois, le processus sera plus lent, car le Pinot n’a pas la versatilité de la Syrah. La courbe d’apprentissage sera moins marquée, mais pourrait atteindre le même niveau de qualité, à terme. Donc, pour entamer cette petite revue, je commence avec un deuxième vin de Kingston Family. Deuxième parce qu’il suit sur ce blogue la superbe Syrah, Bayo Oscuro, du même producteur, et deuxième car c’est le rang qu’il occupe dans la hiérarchie des Pinots de Kingston Family derrière la top cuvée appelée Alazan.

La robe est d’une jolie teinte rubis assez translucide. Le nez est très discret à l’ouverture, et gagne un peu en expressivité quelques heures plus tard. À ce moment on peut y distinguer des arômes de fruits rouges, particulièrement la fraise, auxquels s’entremêlent des notes épicées rappelant un peu la cannelle, ainsi qu’un aspect terreux particulier. Heureusement, la bouche se montre plus volubile, et ce dès le départ, bien qu’elle gagne quelque peu en harmonie avec les heures d’exposition à l’air. Ce qui frappe dès le départ avec ce vin c’est la présence soyeuse et lisse, qui avec le gras sous-jacent, donne presqu’une impression d’onctuosité à l’ensemble. De manière un peu paradoxale, cet aspect tactile aguichant sert de support pour révéler un vin beaucoup plus sérieux au niveau des saveurs. Celles-ci reflètent bien les arômes perçus au nez, mais en terme gustatif, malgré une bonne intensité, il se dégage une impression de quasi austérité. Je dis quasi, car austérité est un mot trop fort, mais disons qu’on est loin du Pinot Noir du Nouveau-Monde au profil doux et très exubérant. Ce Tobiano est à la fois caressant et réservé. La combinaison de ces deux caractères procure un effet de contraste intéressant qui demande à être apprivoisé au fil de la dégustation. La finale poursuit dans l’effet de contraste que je viens d’évoquer, offrant du même coup une bonne persistance des saveurs.

Ce Pinot Noir a laissé un peu perplexe le dégustateur que je suis. Un vin comme assis entre deux chaises, qui s’offre et se refuse un peu dans le même mouvement. Un vin ambivalent qui m’est apparu à la fois sensuel et cérébral. Quand même, si je dois porter un verdict, je ne peux que reconnaître la qualité d’ensemble, et laisser la porte ouverte pour le futur, chose qu’on refuse trop souvent à des vins de ce prix et de cette origine. Dans son état actuel, à 27.40$, le vin n’est pas une grande aubaine, compte tenu de son origine. Il existe des Pinots chiliens de qualité similaire offert à un meilleur prix. Toutefois, dans le contexte de l’offre mondiale en vins de Pinot Noir, ce vin me semble tout à fait compétitif. C’est un vin à essayer si on veut mieux connaître ce que j’appelle le Nouveau-Chili. C’est aussi une façon de se familiariser avec un producteur élite comme Kingston Family. Aussi, je pense qu’il y a de bonne chance pour que ce vin se présente mieux après deux ou trois ans de garde. J’avais vécu cette expérience avec le Pinot Noir, Oda, 2005, Bio Bio de Veranda. J’avais obtenu deux bouteilles de ce vin par le courrier vinicole. La première m’avait laissé un peu sur ma soif, même si la qualité était évidente, alors que la deuxième, ouverte deux ans plus tard, ne laissait pas de doute et faisait regretter que ce soit la dernière. Je vais donner cette chance à ce très jeune Tobiano.
 
 
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