Un sujet qui a fait parler cette semaine sur la petite planète-vin, alors qu’on apprenait qu’une levure OGM canadienne, appelée ML-01, tentait de percer le marché européen, alors qu’elle est déjà autorisée aux États-Unis depuis 2003, et depuis 2006 au Canada. Ma première réaction à la lecture de cette nouvelle a été de me dire que ça ne servait à rien de se rendre jusqu’à l’utilisation d’une levure OGM, car il existe déjà une solution naturelle si on veut éviter le risque des amines biogènes, soit la co-inoculation avec levures et bactéries lactiques sélectionnées. Bien sûr, certains sont même contre l’usage de micro-organismes sélectionnés, mais là on tombe carrément dans l’idéologie. Ceux qui rejettent cette approche de sélection devraient s’assurer de ne pas boire de vins issus de clones de cépages ou de vignes greffées sur des portes greffes sélectionnés.
Qu’on le veuille ou non, l’élaboration du vin est basée sur la maîtrise d’organismes vivants par l’homme, que ce soit au vignoble ou au chai. Le bon vigneron ne laissera pas ses vignes pousser au gré de la nature. La plantation même d’un vignoble est le premier acte de contrôle humain. Ensuite, on parle de conduite de la vigne. Ce qui évoque clairement le contrôle humain sur la croissance de celle-ci. Alors il faut arrêter de percevoir le vin comme un produit naturel. Le vin est issu du génie humain par le contrôle de matériel végétal et microbiologique. Le vin est en quelque sorte la première manifestation de ce qu’on appelle aujourd’hui la biotechnologie. Ceci dit, ça ne veut pas dire que tout devrait être permis lors de son élaboration. Il y a selon moi des limites à ne pas franchir, et l’utilisation de levures OGM en est clairement une. Pas parce que le vin issu de l’usage d’une telle levure pourrait être dangereux. Non, simplement parce modifier le vivant n’est pas un acte anodin, surtout quand ce n’est pas nécessaire.
Ce ne sont donc pas les propriétés de cette levure qui m’embêtent. La modification de celle-ci est mineure. On lui a juste ajouté un gène codant pour l’expression d’une enzyme permettant de dégrader l’acide malique en acide lactique. Il n’y aura pas de poison produit par cette levure à cause de cela, et de l’autre côté, il est bien possible que la bio-synthèse de produits dangereux soit évitée par son usage. Mais encore une fois, il existe des alternatives naturelles atteignant le même but. Alors pourquoi modifier des organismes vivants si cela n’est pas absolument nécessaire? Dans ce contexte, mon opposition aux OGM va bien au-delà de cette simple levure et relève plutôt d’un sage principe de précaution. D’un autre côté, il est clair que l’action des bactéries lactiques post-FA a pour effet d’augmenter la concentration de plusieurs molécules, dont certaines comme les amines biogènes sont non désirables, autant pour des question de santé que pour des questions organoleptiques. Avez-vous vraiment le goût d’avoir de la cadavérine et de la putrescine dans votre verre de vin? Juste les noms vous donnent une idée de l’arôme. Bien sûr, pour ce qui est de l’impact aromatique ou de la toxicité, tout est une question de concentration. Sinon le contenu d’un verre de vin pourrait être comparé à un magasin de chimie, tellement le vin contient de produits toxiques si ingérés à fortes doses. Il est donc très facile de faire de la démagogie en nommant des molécules simplement présentes dans le vin, mais à de très faibles concentrations. Il faut donc faire attention à la façon dont on présente les choses. Pour moi, il est clair que l’opposition aux OGM devrait être motivée par un souci de protection des écosystèmes à long terme, bien plus que pour des raisons de sécurité alimentaire à court terme. En cette matière, la nature laissée à elle-même est à mon sens plus dangereuse que la fameuse levure ML-01.
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samedi 26 février 2011
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Il serait tout de même appréciable de pouvoir savoir si le viticulteur a utilisé de la levure modifiée ou non.
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