mardi 28 décembre 2010

Le bon goût peut-il être subjectif?

Je suis tombé sur un petit texte intéressant aujourd’hui sur le blogue de Jaimie Goode (voir lien), à propos du caractère subjectif ou objectif de la dégustation de vin. Quand on débute dans le monde du vin, le conseil donné par à peu près tous les experts est de faire confiance à son goût. Qu’il n’y a pas de vérité absolue en matière de vin. Que notre palais est le seul qui compte vraiment. Mais au fur et à mesure que l’on progresse dans le domaine, on se rend bien compte que ce discours est d’une grande hypocrisie. Les amateurs passionnés autant que les critiques renommés ne croient pas un instant à ce concept de goût personnel. Au contraire, ils adhèrent à des canons esthétiques traditionnels, à ce que de manière générale on appelle le bon goût, et que personnellement j’aime bien appeler le “vrai goût”. Car hors de ce “vrai goût” il n’y a pas de crédibilité possible. Bien sûr, à l’intérieur de ce goût légitime, chacun pourra avoir ses préférences, mais pour conserver sa crédibilité, il vaudra mieux ne pas rejeter certaines choses. Vous n’aimez pas les vins qui sentent l’écurie, le poulailler, la sueur, le crottin de cheval et autres odeurs ordinairement désobligeantes, lorsque rencontrées ailleurs que dans un verre de vin? Ne le dite pas trop fort. C’est que vous n’avez pas encore apprivoisé une partie du “vrai goût”. Même chose pour les vins blancs tirant sur l’oxydation, ce n’est pas un défaut, non. Ça fait partie du style du producteur.

Donc, la prochaine fois que vous lirez un expert qui dira qu’il faut découvrir son palais, et que celui-ci ne peut pas se tromper. N’en croyez rien. En matière de vin, il y a des goûts acceptables et reconnus par les gens sérieux et expérimentés. Des goûts qu’il faut apprivoiser si on veut être pris au sérieux comme amateur, et il y a les goûts déviants, comme aimer les vins rouges sur la douceur. Je lisais mes amis de FDV cette semaine à propos d’un vin rouge californien très populaire à la SAQ, et apparemment d’une douceur intolérable. La condescendance de plusieurs illustrait bien mon propos sur l’existence d’un “vrai goût” (voir lien). D’ailleurs, l’utilisation courante au Québec du terme “guidoune” (fille facile, prostituée) pour décrire ce type de vin est assez révélateur. Notre vieux fond catholique ressort alors, avec le goût respectable d’un côté, qu’on pourrait associer à l’épouse légitime, et le goût pervers et inacceptable de l’autre, associé à l’image de la fille de joie.

On entend souvent dire que la dégustation est un processus qui inclut une part d’apprentissage. C’est vrai. Il est aussi vrai que l’on peut développer des goûts à l’usage. Mais il est aussi vrai, je pense, que l’apprentissage inclut souvent un processus de correction, où l’on enseigne ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas. Cela n’a rien à voir avec les sensations réelles et leur appréciation. Dans ces conditions, on ne développe pas le goût, mais plutôt l’idée de ce qu’il devrait être.

http://www.wineanorak.com/wineblog/uncategorized/so-is-wine-tasting-subjective-or-objective

http://www.fouduvin.ca/viewtopic.php?f=2&t=17187

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19 commentaires:

  1. Salut Claude,

    Tu touches à un point que je trouve important dans ce texte, même si bien sûr je ne te suis pas pour ce qui est des implications pour ce qui est du "bon goût" , de la dictature de l'élite, etc.

    Pendant longtemps je ne comprenais pas vraiment pourquoi le monde du vin, notamment une certaine forme de presse, se plaçait dans la situation paradoxale voulant que le vin est À LA FOIS quelque chose de complexe, qui demande un vif intérêt ou de consulter des "experts" pour faire les 'bons choix" ET quelque chose où le goût personnel est l'outil le plus important pour progresser.
    Et puis je me suis mis à réfléchir aux domaines où sévit une telle contradiction flagrante... Certainement le monde du cinéma repose aussi sur le fait que l'opinion de tout un chacun est important MAIS également on prend le soin de faire la critique professionnelle des films, de donner des prix très officiels, etc. La musique pop fait aussi preuve d'une telle dualité, ce qui est intéressant car le monde de la musique classique a tendance à ne pas trop faire cas des opinions bien personnelles ou populaires (longue digression que je supprime ici pour ne pas perdre le fil conducteur). La gastronomie est un autre exemple de cette inconstance de jugement.
    Deux points communs dans tous ces exemples : (1) les domaines s'adressent à une vaste clientèle potentielle, qu'il faut convaincre à s'intéresser sans se sentir complètement intimidé (2) une réelle critique sérieuse du domaine dans un contexte assez large n'existe pas vraiment.

    Le problème que tu poses ici dans le monde du vin est celui du CANON. Qu'est-ce qui définit la notion de CANON au sens esthétique dans un domaine donné. Je dirais que le monde du vin est encore très loin d'avoir une discussion articulée en la matière. Je pense qu'une des raisons est que les artisans eux-mêmes se prononcent assez peu de ce côté, contrairement à des domaines tels la littérature par exemple.

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  2. Olivier,

    Autant le goût personnel ne peut tout dicter, et peut être un frein à la progression du dégustateur. Autant le conformisme intégral à un goût classique, perçu comme idéal, est une aberration qui confine au renoncement de l’individualité du même dégustateur. La question qu’il faut se poser, c’est de savoir s’il faut former des palais ou des esprits en matière de goût. Moi je continue de penser que trop souvent on forme des esprits. Des esprits formatés qui ensuite contrôleront l’appréciation des choses émanant des sens. Comment peut-on s’éduquer sur le vin sans que cela n’altère nos perceptions, notre goût réel? Moi je pense que c’est en tentant de ne rien rejeter rien de manière universelle. Surtout, en ne rejetant rien pour les autres. C’est plus facile à dire qu’à faire. Je le sais. Je suis moi-même déjà tombé dans ce travers. Mais une chose est sûre dans mon esprit, la pression des idées reçues est réelle, et il est de meilleur ton de rejeter et mépriser un rouge doucereux du Nouveau-Monde, de prix abordable, qu’un rouge renommé de l’ancien monde aux arômes discutables de “terroir”. Il existe des cibles faciles en matière de vin, tout comme il existe une tendance malsaine à tenter de s’élever en rabaissant ce qui sort du cadre classique. Personnellement, il y a longtemps que j’ai renoncé à l’objectivité en matière de dégustation. C’est pourquoi je ne note pas les vins que je commente ici sur ce blogue. Est-ce que ça veut dire que mon jugement est totalement subjectif? Je ne pense pas, mais il n’est pas totalement objectif non plus. Il est influencé par ma sensibilité propre, et par mes préjugés. C’est d’ailleurs probablement ce qui en fait l’intérêt pour ceux qui me lisent avec régularité.

    Claude

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  3. Claude,

    Je suis parfaitement d'accord sur le fait que le conformisme est très dommageable, probablement plus encore que le refus du dégustateur de jamais se remettre soi-même en question, puisqu'il fausse toute forme de consensus possible et réel sur ce qui constituerait un grand vin.

    Pour moi l'individualité du dégustateur n'est intéressante que dans la mesure où celle-ci peut ouvrir de nouveaux horizons de dégustation pour autrui. Ceci suppose qu'il peut y avoir un échange constructif pour pouvoir faire passer une vision individuelle à une vision inter-personnelle. C'est la première étape à mon avis pour développer des consensus relatifs quant à une notion de grand vin.

    Entre subjectivité et objectivité il y a quelque chose qui ressemble à de l'inter-subjectivité... C'est-à-dire que l'on reconnaît les limites du goût personnel et qu'à travers un partage (oral, écrit ou tout simplement gustatif) on aspire à quelque chose se rapprochant un peu de l'objectif. Si le processus d'échange se rapproche malheureusement parfois de la confrontation - en supposant les intervenants bien intentionnés - c'est qu'il est difficile de réconcilier certaines vues, mais le résultat donne toujours à mon avis une synthèse meilleure que la position initiale. Lorsque ce processus est fait sur une longue période et avec beaucoup de dégustateurs, on se rapproche d'une forme de vérité féconde à mon sens.

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  4. Claude, je ne crois pas que de dire qu'un vin est guidounne soit une chose mal en soit. C'est comme la poutine et les hot-dog, c'est mauvais pour la santé mais délectable lorsque l'envie nous prend.

    De manière sérieuse, un vin sucré (trop ?) est un fait. Il entraine un manque d'équilibre. C'est un fait. Qu'on soit une bébitte à sucre ou non ayant des connaissances ou non, ne change pas ce fait à mon avis.

    Black

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  5. Olivier,

    Pour t’avoir souvent lu, je sais que la notion de grand vin est importante pour toi, tout comme la connaissance la plus large possible des différentes formes de ce liquide par le biais de la dégustation intensive. Comme tu écris moins maintenant, j’ignore si tu dégustes autant qu’avant. Peu importe. Ce type de démarche basée sur une forte implication est hautement respectable, mais elle comporte aussi des limites. La limite principale étant, à mon sens, la perte de distance face au sujet. Ce n’est pas une critique de ma part, juste une constatation. Un constat facile, car je vis un peu la même chose dans mon champ plus restreint, même si je ne déguste pas beaucoup et que je ne suis pas dans une démarche “grand vin”. Quand on est dans ce type de démarche, à cause de l’implication que ça suppose, notre point de vue est forcément différent de celui du dégustateur occasionnel qui boit seulement pour son plaisir. Le dégustateur “engagé”, si je puis utiliser cette expression, ne boit pas que pour son simple plaisir. Il boit pour comprendre et mieux connaître. Ce faisant, il aura tendance à comparer et à intellectualiser les choses. C’est normal. Pourquoi déguster tant de vins si on ne peut faire de recoupements entre ceux-ci?

    Comme je l’ai dit, ce type de démarche est légitime et mérite le respect. Toutefois, cet exercice découple le dégustateur impliqué du dégustateur moyen, du buveur occasionnel. On est dans deux types d’expériences difficilement réconciliables. Un bel exemple de ce phénomène est celui des chroniqueurs vin qui s’adressent à un large publique. Ceux-ci sont souvent forcés de recommander des vins qu’ils trouvent au mieux corrects et ennuyants. Des vins qu’ils n’achèteraient pas pour eux-même, mais des vins que le buveur occasionnel pourra apprécier, car il portera un regard frais sur ceux-ci. À force de s’intéresser à un sujet, on finit par être moins facilement excitable. C’est normal. Mais en même temps, ça représente un dilemme. S’intéresser à un sujet pousse-t-il forcément vers l’élitisme? Par exemple, un musicien peut-il apprécier un concert de la même façon qu’un simple mélomane, ou bien quelqu’un n’ayant aucun intérêt particulier pour la musique? Est-ce que les dégustateurs professionnels, passionnés, experts, ou “engagés” sont confinés à ne parler de vin qu’entre eux pour être compris? Si c’est le cas. Comment peuvent-ils interagir de façon authentique avec le commun des dégustateurs? Je pense que c’est là une bonne question.

    Comme je le disais plus tôt, je comprend cette situation, car je me considère aussi comme un dégustateur “engagé”. Mais mon engagement se fait sur un terrain limité, et loin des sommets reconnus. Ceci dit, je suis loin de déguster avec l’intensité d’un professionnel ou d’un grand passionné. Je ne déguste pas non plus de vins très renommés ou très chers. Je ne suis donc pas à la recherche du grand frisson. Quand je déguste un vin, je ne me demande jamais s’il est grand. Comme je ne me demande jamais s’il mériterait une note de 94 ou de 95. Ce serait pour moi un non sens. Quand je déguste, je me concentre sur l’aspect plaisir d’abord et avant tout. Ensuite, j’analyse aussi le style, et à la fin je tente d’évaluer le potentiel d’évolution. Je ne cherche pas de vérités, même consensuelles, et je ne prétend pas en posséder. Je tente d’offrir un point de vue différent et honnête, qui ne cherche pas la différence pour la différence. Je suis aussi conscient des limites de ma démarche, mes lecteurs aussi, je pense.

    Claude

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  6. Salut Black,

    Je ne sais pas si c’est mal d’utiliser le terme “guidoune” pour caractériser un vin, mais une chose est sûre, c’est que ce terme est presque toujours utilisé de manière péjorative. Tout est question de point de vue. Hors du cadre puritain dans lequel il est employé, ça pourrait même être un compliment! Pour ce qui est de la douceur dans le vin. J’ai toujours l’impression qu’il y a un double standard à ce sujet. Les blancs allemands ou alsaciens peuvent être doux et personne ne se plaint. C’est une question de style. Même chose en rouge pour les amarones et certains autres vins de Vénétie. Quand on tombe sur un vin du Nouveau-Monde, la douceur devient subitement un péché capital, alors qu’on pourrait très bien y voir, comme ailleurs, un choix stylistique et dans certains cas une expression honnête du terroir. Maintenant, si on parle d’équilibre et de qualité, c’est autre chose. Ce style peut avoir différents niveaux qualitatifs. Pour ce qui est du fameux “Ménage à Trois” dont il est question sur FDV. Je ne l’ai pas goûté. Mais quel est le niveau qualitatif général des vins californiens de ce prix? Selon mon expérience, pas très élevé. Alors dans ce cas, la douceur devient selon moi accessoire. Mais au-delà de cela, c’était plus l’attitude de certains commentateurs sur ce fil qui me causait problème. Le syndrome cour d’école où la meute avait identifié une cible facile, un “reject” commode sur lequel on pouvait frapper dans retenue. Je sais que ce n’est pas de mes affaires, mais quitte à être sur le sujet, pourquoi pas un fil: “Brouilly Georges Duboeuf: Comment expliquer cette folie qui ne se dément pas?!!!”. Je blague bien sûr, mais j’aurais aimé voir si le ton général aurait spontanément été le même.

    Claude

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  7. Claude, c'est comique que tu mentionnes la quille de brouilly, car j'avais posé exactement cette question lors du fameux "spécial" qui faisant en sorte qu'il se détaillait ±13$. ;-)

    Pour le MAT, et 2 autres vins que je nomme dans le fil de discussion, c'est le "hype" populaire qui m'agace. Qu'il soit sucré ou pas, ça m'importe peu tu as raison à cet effet. Et je suis également d'accord avec le fait que les USA à -20$ qui ont de la gueule sont plutôt rares. Vive du Cousino Macul à 3$ de moins en plus !!!

    Je ne suis pas pour le formatage du goût mais il ne fait pas non plus encourager la démocratisation du mauvais-goût.

    Bonne année Claude.

    Benoit alias Black.

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  8. Effectivement il y a un spectre très vaste entre les dégustateurs "engagés" et les dégustateurs "occasionnels", mais je ne pense pas que cela soit un problème en soi pour la communication, du moment que chacun est conscient de ce que l'autre cherche avant d'entamer la discussion.

    Je trouve toujours étrange que des "occasionnels" pensent pouvoir tout simplement remettre en question un jugement d'un "engagé" sans réaliser que cela requiert au moins une forme de discussion au-delà des goûts bien personnels. Perso je suis "occasionnel" dans beaucoup de domaines, prenons par exemple le cinéma, et je suis conscient que mes attentes ne sont pas les mêmes qu'un enragé des vues. Dois-je sentir qu'il est impossible de discuter? Non, mais si je veux essayer de convaincre un cinéphile sur un point particulier, je suis conscient que je devrai ramer! C'est la même chose dans le vin.

    Je pense que le fossé ne relève pas tant d'une impossibilité à communiquer mais plutôt du médium Internet . Sur le Web 2.0, la valeur cardinale est de pouvoir S'EXPRIMER LIBREMENT, faire SAvoir au monde son INDIVIDUALITÉ, indépendamment de ce que chacun a vraiment comme expériences, comme idées sur un sujet donné. Cela crée un bruit ambiant et constant, qui empêche souvent d'aller au fond des choses, sans se sentir attaqué, pour apprendre d'un échange.

    Tu dis ne pas chercher de vérité, mais ton blogue est plein de questionnements, de recherche pour départager ce qui est chargé en idées originales et ce qui est tout simplement du conformisme à d'idées reçues...

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  9. Olivier,

    Les comparaisons du vin avec l’art sont toujours un peu boiteuses, comme celle que j’ai faite avec la musique. Mais pour reprendre ta comparaison cinématographique. Entre le cinéphile qui décortiquera le mode narratif d’un film, les techniques de caméra, qui saura percevoir des influences et des références externes, en sachant les placer dans un contexte global, et le simple spectateur qui ne verra rien de tout cela et qui se laissera juste impressionner par le résultat final à l’écran. Qui verra vraiment le film pour ce qu’il est? Si j’écrivais et réalisais un film, mon but serait de toucher le spectateur au niveau des émotions d’abord, et l’intellect ensuite par les idées que véhiculerait mon film. Pas par sa technique, ses références pointues, ou sa place dans la filmographie mondiale. Mais le cinéphile invétéré est-il toujours sensible aux intentions premières d’une oeuvre qui ne vise qu’à toucher le spectateur au-delà de toutes autres considérations, ou n’est-il pas à la recherche d’un objet avec lequel il pourra se confronter et mesurer ses connaissances? Je pense que la même question se pose en matière de vin. Moi j’aime comprendre le pourquoi des choses en matière de vin. C’est vrai. Mon intérêt le plus vif, il est là. Mais quand je disais ne pas rechercher de vérités, c’était du point de vue qualitatif. Surtout pas de vérités absolues. Pour ce qui est du Web 2.0 qui permet à quiconque de s’exprimer librement sans être un expert, même d’énoncer des énormités. Moi, sans surprise, j’y vois une valeur ajoutée. Le bruit ambiant n’existe que si on y prête l’oreille. La toile est un bar ouvert où chacun est libre de choisir ce qui lui semble pertinent. À moins bien sûr de déplorer ce que l’on considère comme du bruit de fond pour son effet négatif sur les autres. Mais dans ce cas, qui peut distinguer le bruit nuisible du son valable? On en revient toujours au même point. À la subjectivité et à l’objectivité. Où tracer la ligne? Quel point de vue adopter? Aller en profondeur, rester à la surface, ou demeurer entre deux eaux? Qu’on le veuille ou non, chacune de ces expériences est différente. L’avantage du grand plongeur, c’est qu’il est le seul à les cumuler toutes. Mais encore faut-il qu’il puisse se rappeler de le douce sensation d’être légèrement bercer par les flots...

    Claude

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  10. oilà ce que dit le Larousse sur la définition du goût: * Un des cinq sens, renseignant sur les saveurs et la composition des aliments.



    * Saveur de quelque chose, caractéristique reconnaissable par le sens gustatif : Un goût salé, amer. U...n goût de brûlé.



    * Capacité à discerner ce qui est beau ou laid selon les critères qui caractérisent un groupe, une époque, en matière esthétique : Elle a du goût. Maison meublée avec goût.



    * Attirance pour un aliment, une boisson, quelque chose ou quelqu'un : Il a le goût du risque.



    * Littéraire. Impression qui reste de quelque chose : Le goût amer des souvenirs."
    Sans doute, que pour pouvoir discerner le beau et le laid, faut il que les critères soient établis.
    La capacité d'exercer son goût reste dans l'exercice fréquent et répétitif, passe donc par une phase éducationnelle. Plus on expérimente un domaine, plus on l'affine. Les dégustateurs professionnels peaufinent un savoir, mémorisent les saveurs et procèdent à une sélection naturelle basée sur leur culture. Reste à en établir les paramètres.
    Le goût et le bon goût se voudraient impérialistes? Y a t' il une civilisation du Goût? L'amertume, l'acidité, le sucré etc restent des bases de départ. Leur cuisine fait toute la différence, L'industrie de l'agro-alimentaire a formaté le goût de plusieurs générations en y ajoutant du sucre. En préparant des addictions. Peut on rester objectif sans sombrer dans la subjectivité? Je ne comprends pas cette question: le bon goût peut-il être subjectif? Dès qu'on le qualifie de bon, il en devient automatiquement subjectif.Et éminemment restrictif.
    Marilyn Johnson

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  11. J'étais en visite chez mon père hier pour le temps des fêtes. Devinez quelle bouteille il sort pour le souper? Un superbe Brouilly, 2009, de Georges Duboeuf!!! Il avait profité d'une promo sur ce divin nectar. C'est un vin léger et doux. Oui, oui, doux, et facile à boire. C'est loin d'être imbuvable, mais tout aussi loin d'être remarquable. Un vin conçu pour ne pas déplaire au plus grand nombre. Mais au prix régulier de 18.25$, c'est un très mauvais RQP. À 25% de rabais c'est juste honnête.

    Au menu il y avait du rosbif. Sinon, j'aurais eu droit à un beau "Ménage à Trois" en blanc, acheté lui aussi lors de cette promo. Les joies de la SAQ. Celle-ci vend ce qu'elle décide de promouvoir. Je l'ai toujours dit.

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  12. claude,
    le MAT n'a rien de doux. le coté guidoune bonbon peut etre charmeur dans certains vins, mais a l'extreme comme le MAT est ( pour moi en tout cas ) un énorme turn off. on m'a offert une bouteille pour les fetes que je te cederais volontier pour que tu juges par toi meme! ;)
    a+ boule

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  13. Benoit,

    Pour la douceur du MAT, je me fiais aux commentaires lus sur FDV à son sujet. Quand je parle de douceur, je parle bien sûr d'impression sucrée. Je préfère utiliser le terme douceur que le néologisme "sucrosité" qui réfère trop directement au sucre. L'aspect perçu comme sucré dans un vin ne vient pas toujours du sucre résiduel. Aussi, un aspect négligé dans cette discussion est la sensibilité individuelle à cet élément précis de la palette gustative. On oublie trop souvent la grande variabilité de sensibilité entre dégustateurs. Chaque dégustateur possède au niveau physiologique un profil de sensibilité gustative particulier, ce qui rend souvent difficile la comparaison des perceptions.

    Claude

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  14. Ce n'est pas la SAQ qui décide de pousser ce genre de produit mais bien les agences et domaines qui injectent des millier de dollars pour la promotion.

    Marc

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  15. Peut-être, mais de verser tout cet argent en promo à la SAQ donne des avantages sur le plancher des succursales. Penser que le personnel de conseillers de la SAQ n'oriente pas les ventes ne me semble pas réaliste. Le consommateur moyen n'achète généralement pas un vin juste parce qu'il est sur un présentoir spécial.

    Claude

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  16. Olivier,

    Je viens de lire le fil de discussion sur LPEL portant sur ce qu'est un grand vin. Je n'ai pu m'empêcher de sourire face à certains commentaires. Bien sûr on énonce des critères objectifs, mais en même temps on craint de mal percevoir ces critères à l'aveugle, alors qu'à étiquette découverte les craintes se dissipent et on sent l'envie de se laisser aller à l'émotion de la grande rencontre, du grand moment de communion. Sauf qu'il est loin d'être clair si la communion est toujours avec le vin, ou en partie avec l'étiquette.

    L'appréciation du vin comporte un côté objectif et l'expérience aide sûrement à maîtriser cet aspect. Je n'ai pas de doute là-dessus. Mais rendu à un certain point, pour séparer le très bon de ce qui est qualifié de grand, il semble que c'est le côté subjectif qui fait la différence pour la grande majorité des dégustateurs. Pour voir grand, îl faut s'attendre au grand, ou à tout le moins penser que le grand est possible. En d'autres termes, il faut un contexte mental favorable.

    Claude

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  17. Effectivement, Claude, les gens entretiennent une relation ambivalente avec la dégustation à l'aveugle. Elle remet souvent en cause beaucoup du discours autour du vin et se montre un révélateur assez impitoyable de l'amour de l'étiquette qui existe très clairement dans le monde du vin.

    Je pense qu'effectivement pour séparer le très bon du "grand", il y a à toute fin pratique trop de paramètres à prendre en compte et pas assez de répétition de l'exercice de dégustation de vins dans les diverses catégories. Par contre, je suis pas mal convaincu que des gens comme des maîtres de chai d'expérience ayant encore intactes leurs facultés organoleptiques et leur passion, ou encore un professeur d'oenologie tel Denis Dubourdieu, arrivent à parler du vin de manière intrinsèque, sans référence à l'étiquette.

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  18. Très intéressant comme débat. J'apporte surement peu d'eau au moulin, en présentant des considérations que vous avez surement eues, ou que vous avez lues plusieurs fois, mais bon, on sait jamais.

    Assez d'accord par rapport à l'aspect ambivalent versus la dégustation à l'aveugle. Il y a souvent une retenue à l'aveugle qui n'existe pas quand la bouteille est sur la table. On cherche surtout, on s'amuse ensuite. C'est un plaisir plus intellectuel.

    Déguster 40 vins en une heure debout dans une pièce blanche à la borgne, c'est un grand plaisir, mais c'est purement intellectuel. Certaines personnes passent des commentaires du genre "ouin, ouin, on s'amuse". Mais c'est aucunement hédoniste. Le plaisir, c'est d'essayer d'identifier une certaine tendance, une certaine typicité, d'un millésime, d'un cépage... Chose qu'on essaie d'identifier par la suite dans le salon d'un ami qui nous sert une bouteille dans un sac en papier brun. Et on essaie de trouver les caractéristiques techniques qui en feraient ou non un grand vin. Équilibre, longueur, complexité...

    L'amour de l'étiquette, s'il existe, c'est beaucoup qu'avec la notion de grand vin, vient inévitablement je pense la notion de s'offrir le meilleur, de se permettre une folie, un grand moment, de toucher au rêve, de "se gâter". De s'offrir quelque chose d'exceptionnel. Et je parle pas nécessairement de prix. J'ai des bouteilles que je trouve "grandes" à 25$, à l'occasion, et que "j'économise" en servant des vins beaucoup plus chers à mes convives. Parce que malgré le prix relativement abordable, quand j'en ouvre une, j'ai l'impression de m'offrir un moment véritablement chargé en émotions. Ca arrive pas souvent, avec peu de vins. Coincidence par rapport au post précédent, ca m'arrive entre autre souvent avec le blanc sec de Dubourdieu, à Doisy-Daene, que je trouve souvent extrêmement séduisant à 25$, une leçon de sauvignon bordelais...

    Je sais pas tellement si c'est plus souhaitable d'être à un tel point analytique et ferré en tant que dégustateur, tel un Dubourdieu, qu'on soit en mesure d'établir de manière objective que c'est grand ou non, ou si c'est plus souhaitable de garder un coeur d'enfant, et des yeux brillants devant une bouteille, même si ca livre peut-être pas tant que ça à l'aveugle.

    Une chose est certaine, sans être un dégustateur d'exception, j'ai goûté beaucoup de vins au cours des quelques dernières années, et parfois, en discutant avec des gens qui sont pas très amateurs, je me dis que j'aimerais bien, quand même, mettre mon nez dans un verre et trouver que ca "sent le vin rouge", juste pour voir ce que ça fait...

    J'aimerais regoûter pour la première fois de ma vie un bordeaux racé, étoffé, un peu austère, sérieux, complexe, et long, juste pour voir ce que ca fait... J'aimerais regoûter un vieux bourgogne de 25 ans, aérien, délicat, mais parfumé et envoûtant pour la première fois, juste pour voir ce que ca fait... Parce que je sais que mon expérience aujourd'hui avec les même vins serait différente. Je passerais une portion de l'expérience à me demander s'ils sont légitimement bons, alors que les souvenirs que j'ai de ces moments sont encore aujourd'hui chargés de l'émotion, des frissons que j'ai vécu lors de ces premiers amours... Et ma conclusion serait surement que c'est bon, mais ca manque un peu de longueur, que la pointe végétale du bordeaux m'évoque un manque potentiel de maturité, etc...

    Au plaisir, et amicalement,

    Simon

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  19. Merci pour ce texte Simon. Tu reformules très bien un aspect que j'avais évoqué autrement et qui m'apparaît important et négligé à propos de la dégustation. Celui de la perte de fraîcheur du professionnel ou de l'amateur passionné, voire engagé.

    Au-delà de cette perte de fraîcheur des sens et de la perception mentale qui vient avec l'expérience. Il se développe aussi un phénomène connexe qui à mon avis peut aussi altérer l'appréciation du vin. Ce phénomène est celui de la prise de position idéologique. Avec le temps, on peut devenir partisan en matière de vin et appuyer ceux qui semblent véhiculer ce en quoi on croit. De cette façon, on en vient parfois à apprécier des vins pour des raisons qui vont au-delà du simple contenu de la bouteille, alors que l'expérience de dégustateur peut parfois permettre de les reconnaître à l'aveugle. Combien de fois j'ai vu des vins se faire démolir à l'aveugle par des dégustateurs, car ceux-ci avaient cru reconnaître dans ceux-ci des vins du camp « ennemi ».

    Essayer d'aborder le vin avec fraîcheur et neutralité est à mon sens le plus grand défi du dégustateur expérimenté, et ça demande une qualité rare dans le monde du vin, l'humilité véritable. Ceci ne veut pas dire qu'il faille renoncer totalement à une expérience chèrement acquise. Non. C'est juste une question d'équilibre dans l'état d'esprit face au vin.

    Claude

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