German Lyon
Le Malbec est la carte cachée de l’offre chilienne en rouge. Un cépage que le pays semble mal à l’aise de mettre de l’avant, tellement celui-ci semble identifié à son voisin et rival argentin. D’ailleurs, lors de la dernière dégustation “Vin du Chili”, j’ai eu la chance de discuter avec German Lyon, l’oenologue en chef de la maison Perez Cruz, qui s’exprime parfaitement en français. Nous avons discuté de plusieurs sujets, mais celui-ci a insisté sur sa volonté de refléter dans ses vins le terroir de l’Alto Maipo. Il a d’ailleurs spécifié que l’appellation Côt choisie pour ce vin, malgré le fait qu’elle réfère à l’origine française du cépage, était motivée par une volonté claire de se démarquer de ses contreparties argentines. C’est quand même un peu ironique quand on pense que certains producteurs de Cahors apposent maintenant le mot Malbec sur leurs étiquettes, pour tenter de profiter de la vague positive entourant ce cépage. Pour ce qui est de ce Côt, 2008, tout ce que je sais sur son élaboration, c’est qu’il est assemblé avec de petites quantités de Carmenère et de Petit Verdot.
La robe est bien foncée et opaque. Le nez est d’une expression bien dosée et exhale d’invitants arômes de fruits noirs qui pour moi sont typiques de ce cépage, complétés par des notes terreuses et doucement épicées, ainsi que par un léger aspect de fleurs fanées. Beau nez de jeune vin avec une bonne profondeur. Cela se poursuit en bouche de très belle façon, avec un vin équilibré d’entrée. C’est intense, sans être exubérant, avec des saveurs de grande qualité, bien soutenues par ce qu’il faut d’acidité et d’amertume. La palette de saveurs montre bien qu’on a affaire à un Malbec sud-américain. Le milieu de bouche est concentré et permet de mieux apprécier l’aspect épicé bien mesuré qui complète admirablement le fruit. Les proportions sont bien ajustées, ce qui donne un vin assez compact, mais avec quand même du volume, et une structure tannique raffinée. Un vin qui évite les excès donc, ce qui le rend facile et agréable à boire. La finale se déploie sous le signe de l’harmonie, avec un beau fondu de saveurs sur une allonge de bon niveau.
J’ai été ravi par ce vin. En même temps, j’ai été surpris qu’il soit aussi abordable à un si jeune âge. Rien n’accroche, et ça coule sans efforts. Malgré la décision de Perez Cruz de le nommer Côt, au lieu de Malbec, ce vin m’est apparu fidèle à ce qu’on peut attendre d’un très bon vin sud-américain de ce cépage. En le dégustant, je ne pouvais m’empêcher de penser que son niveau qualitatif rejoignait celui d’un Catena, Alta, du double du prix. Vous aurez donc compris qu’il s’agit pour moi d’un fort RQP. Même s’il est déjà très agréable dans sa livrée de jeunesse, ce vin possède à mon avis un bon potentiel d’évolution. Le Chili doit continuer de diversifier son offre et le Côt/Malbec me semble un atout incontournable de la nouvelle donne chilienne. Ce pays doit éviter d’être identifié à un seul cépage, comme c’est un peu le cas avec le Malbec en Argentine. Il doit plutôt être synonyme de diversité, comme c’est le cas de tous les grands pays vinicoles, et à n’en pas douter, le Chili est en train de se transformer en grand pays vinicole. C’est un “work in progress” intéressant à suivre, tout en étant abordable et agréable à goûter. La SAQ offrira bientôt le Cabernet Sauvignon, Reserva de cette maison, ainsi que les deux cuvées de luxe de la maison, le Liguai (50$) et le Quelen (65$). J’ai eu la chance de goûter ces deux vins et ils sont très bons. Le Quelen m’est apparu comme très original, probablement à cause de sa très forte proportion de Petit Verdot (45%). À suivre.
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